Maudits», «Quelle tristesse !», «Le rêve brisé». Aucun journal n'use de mots assez forts pour qualifier l'immense déception engendrée par la défaite olympienne concédée la veille à Bari. Tous publient la photo d'un Basile Boli inconsolable au milieu de la pelouse du stade San Nicola. Le symbole de la désolation qui s'est emparée des joueurs marseillais, battus à la loterie des tirs au but.
Comment en est-on arrivé là ? Comment le rêve a-t-il filé entre les doigts des Olympiens ? Il aurait fallu faire jouer l'expérimenté Tigana, l'habitué des grands matches. Bernard Tapie a trop cloisonné l'équipe avant la finale. Goethals aurait du faire entrer plus tôt Dragan Stojkovic, l'ex-joueur de l'Etoile Rouge dont ses anciens coéquipiers semblaient avoir eu peur bleue. Manuel Amoros n'aurait jamais du «changer de côté» au dernier moment lors de l'exécution de son tir au but. Bref, encore aujourd'hui, il n'est pas un supporter sans avis sur la question.
Toujours est-il que l'OM a raté son match. Et que la petite forme de son trio magique n'y est sans doute pas étrangère. Comme il le reconnaîtra par la suite, le coach yougoslave Petrovic n'avait pour seule tactique que de neutraliser les attaquants de l'OM. Et ce, malgré la richesse technique de son équipe. Après coup, à la lecture de la composition de l'Etoile Rouge, c'est encore plus flagrant. Ce maudit 29 mai, les brillants Prosinecki, Mihajlovic ou encore Savicevic ont passé 120 minutes à détruire plutôt qu'à créer. Une stratégie regrettable pour le spectacle mais diablement payante au final.
Pourtant, malgré ce refus de jouer manifesté par son adversaire, l'OM est parvenu à se créer plusieurs occasions franches pour l'emporter. La première, un tir trop croisé de Papin aurait bien pu changer toute la physionomie du match.
Par la suite, Chris Waddle (très discret ce soir-là) a également eu deux belles opportunités. Dont une, à quelques secondes de la fin du temps réglementaire. Et c'est ainsi que cette stérilité offensive conduisit les Marseillais à la terrible séance des tirs au but. Un exercice, on l'apprendra plus tard, auquel les Yougoslaves étaient rompus puisqu'ils les tiraient en championnat dès qu'il y avait match nul. Les joueurs de l'Etoile Rouge réussiront d'ailleurs un sans-faute alors qu'Amoros connaîtra un raté décisif. Tel un ange, le rêve était passé...
A son retour à Marseille, l'OM est accueilli par des milliers de supporters. Pratiquement tous les Olympiens portent des lunettes noires derrière lesquelles on devine des yeux rougis par les pleurs. Bernard Tapie redonne le sourire à la foule en promettant «qu'on ne va pas s'arrêter là...» Un peu plus tôt, il avait eu des mots moins réconfortants envers ses joueurs : «Que ceux qui veulent partir ne se gênent pas...»
Etoile Rouge de Belgrade (You) 0-0 OM
(Belgrade vainqueur 5 tirs au but à 3)
Finale de la Coupe des Champions
A Bari, Stade San Nicola
59 000 Spectateurs
Arbitre : M. Lanese (Ita)
Tirs au but réussis : Prosinecki, Binic, Belodedic, Mihajlovic, Pancev pour Belgrade ; Casoni, Papin, Mozer pour l'OM
Tir au but raté : Amoros pour l'OM
Avertissements : Binic (26e), Mihajlovic (40e), Marovic (61e) pour Belgrade ; Boli (28e) pour l'OM
Etoile Rouge : Stojanovic – Sabanadzovic, Belodedic, Najdoski, Marovic, Jugovic, Prosinecki, Mihajlovic, Savicevic (Stosic 83e), Binic, Pancev. Ent : Petrovic
OM : Olmeta – Amoros, Boli, Mozer, Casoni, Di Méco (Stojkovic 111e) - Germain, Fournier (Vercruysse 75e) – Waddle, Pelé, Papin. Ent : Goethals
Le Parcours jusqu'à la finale
- 16e A : OM 5-1 Tirana
- 16e R : Tirana 0-0 OM
- 8e A : Poznan 3-2 OM
- 8e R : OM 6-1 Poznan
- 1/4 A : Milan 1-1 OM
- 1/4 R : OM 1-0 Milan (off : 3-0)
- 1/2 A : Spartak 1-3 OM
- 1/2 R : OM 2-1 Spartak
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